Visite en studio avec Colin Hugh Smith

Colin Hugh Smith

Colin Hugh Smith

Quand il s’agit de l'art, il y a de la place pour tout le monde. - CHS

Colin Hugh Smith peint à partir de son âme. Les couleurs jaillissent et explosent sur la toile avec un élan spontané. Le travail de Colin est vibrant, plein de couleurs et évoque l’émotion. Il peint souvent des bouquets de fleurs, des paysages et explore même parfois l'abstrait selon son humeur. Colin est un artiste en arts visuels depuis plus de vingt ans, mais a toujours exprimé sa créativité tout au long de son cheminement, que ce soit au travers de la décoration intérieure, la littérature anglaise ou même la cuisine (il a été formé en tant que chef en Europe). Il travaille aussi dans les arts de la fibre! «J'ai fait ceci", dit-il nonchalamment avec un soupçon d'un accent britannique, pointant vers le chandail en tricot gris qu'il portait. Y at-il quelque chose qu’il ne peut pas faire? Colin a développé une réputation solide en tant qu’artiste sérieux et il lui reste une grande carrière devant lui.

J'ai visité Colin pendant une journée ensoleillée mais froide en janvier. Je ne sais pas à quoi je m’attendais quand je suis rentrée dans son studio, mais j'ai été agréablement surprise de voir un grand espace ouvert, inondé de lumière. Voici un espace qui reflète la créativité exercée en elle; une source d'inspiration en soi. Les murs turquoises étaient ornées de pièces d'art (faites par lui et ses amis), des livres et revues d'art étaient empilés sur toutes les surfaces. L'atelier de Colin sert à plusieurs usages et accueille plus que ses affaires d'art, mais aussi des objets de tout les jours. Il y a des vêtements de sport accroché à côté du chauffe-eau pour sécher, des poids sur le sol et un balai dans le coin. C’est un espace-à-tout qui était autrefois un appartement, ce qui explique la cuisine et une chambre à coucher pleine de tableaux empilés contre les murs.

Colin est bien sympathique et fut rapide à m’inviter pour une entrevue. Une fois que je suis arrivé, il était très aimable et m'a expliqué sa démarche et son inspiration, et m’a montré des livres et revues qui l'inspirent. Colin fait partie de la communauté artistique depuis un certain temps et il est très bien informé. Au fur et à mesure qu’on parlait, j’ai réalisé qu’il pensait que je connaissais autant le monde de l’art que lui (ce qui est beaucoup!). J'ai dû lui dire que je suis en train d'apprendre et pourrait-il épeler le nom de cet artiste célèbre afin que je puisse faire de la recherche plus tard? Il m'a généreusement prêté une pile de livres d'art de sa collection afin de m’aider à poursuivre mes études. Le plus que je rencontre des nouveaux artistes et que je découvre notre culture créative au Nouveau-Brunswick, le plus je me rends compte de combien il reste à découvrir. C’est tout un cheminement et mon temps avec Colin m'a ouvert les yeux à ce que j'ai encore à apprendre.

Comment êtes-vous devenu un artiste?

La créativité a toujours fait partie de moi. Je suis un décorateur d’intérieur, j’avais ma propre entreprise à Fredericton. Avec la décoration d’intérieur vous devez avoir un sens de la couleur et de combiner les idées. Un de mes projets complétés était la décoration d'intérieur pour la chambre de l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick à Fredericton. Il y a quelques années ils ont vidé la salle à cause de problèmes structurels, et j’ai conçus le nouvel intérieur. J'ai fait beaucoup de projets, aux États-Unis et à l'étranger, mais c’était un de mes projets les plus importants. En 1997 j'ai été diplômé de l'UNB avec un diplôme en littérature anglaise et un mineur en beaux-arts, et une maîtrise en 1999. Ma thèse consistait d’une maîtrise sur les artistes et les poètes (Ezra Pound) à Londres pré-WW1 et mes recherches sur cette période riche ont réveillé mon désir de faire l'art visuel. J'avais un studio face à la rivière à Fredericton, mais la province du Nouveau-Brunswick avait d'autres plans pour le bâtiment (Il est maintenant l'édifice de la Justice). Quand j'ai déménagé à Saint John il y a seize ans, j’ai trouvé cet espace de studio en ville et son propriétaire sympathique par hasard, et je peins ici depuis. Je suis plus au moins autodidacte. J'ai pris des cours d'art au New Brunswick College of Craft and Design et de l'UNB à Fredericton, mais ceux qui m’ont inspirés le plus ont été des cours d'été d'une semaine que Molly Bobak et Bridgette Grant ont animées à Sunbury Shores à Saint Andrews. Molly est mon héros. Elle était un merveilleux professeur qui trouvait le mérite dans le travail de chacun. Elle avait un style très spontanée d'enseignement qui enlèvait beaucoup des «règles» et se concentrait sur des grands coups de pinceaus, les risques et beaucoup de couleur émotionnelle dans votre composition. Les gouttes et les erreurs sont acceptées! Molly m'a appris à m’exprimer, à laisser aller les émotions, à cesser de m’attarder avec le matériel et d'autres distractions,de simplement peindre. J'ai eu de nombreux emplois liés à l'art au fil des années; j'ai enseigné la littérature anglaise à l'UNB; Je suis un écrivain publié; j'ai écrit pour des journaux et pour moi-même, mais l'art visuel est ma façon préférée de m'exprimer.

Avec quels matériaux travaillez-vous?

J’utilise principalement la peinture acrylique. J'aime la texture comme du beurre de la peinture à l'huile, mais les vapeurs peuvent rendre ça difficile. Il y a une méthode pour chaque technique et elles sont toutes différentes. La peinture acrylique sèche rapidement, de sorte que vous devez travailler rapidement; avec la peinture à l'huile, vous pouvez étaler plusieurs couches et les déplacer, mais cela prend une éternité à sécher. Mon style est très spontanée et l’acrylique fonctionne bien pour cela. Je fais aussi parfois l'aquarelle et le collage.

Qu'est-ce qui vous inspire?

Je suis inspiré par des choses à l'intérieur et à l'extérieur. Les fleurs dans le jardin ou les couleurs et les lignes des paysages. Aussi la combinaison de fruits sur une table, un vase de fleurs et des tasses à café occupent une place romantique dans ma mémoire, connecté à mon enfance britannique.

Parlez-moi de votre studio:

Eh bien quand j’y ai aménagé il n'y avait aucune garantie que je serais capable de rester ici, mais me voici seize ans plus tard. J'ai redécoré, enlevé des murs, fait de la peinture, etc. Cela ne ressemble pas du tout à l’espace du début. Ce studio a été un élément constant dans ma vie à Saint Jean. C’est mon espace sacré, plein de lumière, où je peux être seul et libre de distractions. Je viens ici tous les jours. J'ai de la chance!

Parlez-moi de votre processus, comment abordez-vous une toile?

Eh bien, je ne peins pas de la vie; tout est dans ma tête. Je peins beaucoup de fleurs, des paysages, et mon inspiration vient surtout de choses que j'ai vu ou imaginé; quelque chose dans ma mémoire. Je ne suis pas un peintre représentant; ce que je cherche à créer est l'ambiance, l'atmosphère. Cela rend ça plus facile à certains égards, et plus difficile dans d'autres. Parfois les idées sont présentes, et parfois pas. Je suis inspiré par d'autres travaux que je vois, les articles dans des revues d'art, les livres d'art et en ligne. Même si vous êtes inspiré par le travail de quelqu'un, vous le voyez à travers vos propres filtres de sorte que le résultat est toujours différent.

Pourquoi avez-vous choisi de vous établir à Saint Jean?

En partie par défaut, je voulais me réinventer. J’avais une entreprise à Fredericton comme designer d'intérieur et j'était bien connu pour ce que je faisais. J'ai terminé mes diplômes et je voulais poursuivre l'art visuel. J’admirais la belle architecture du centre-ville lors de mes visites à Saint Jean et maintenant je peux l’admirer à tous les jours! J’aime l'ambiance facile, l'énergie mêlez-vous-de-vos-affaires de la ville. Les loyers abordables à l'époque étaient aussi une incitation forte.

Quelle est votre plus grand défi?

Entrer dans le studio et faire face à une toile blanche est un défi. Vous travaillez seul, vous devez vraiment garder un sens de perspective. Vous n’avez aucune critique à part votre propre œil; il faut regarder votre travail et l'évaluer d’une façon objective; avoir un fort sentiment de qui vous êtes et de ce que vous faites, parce que certains jours vous n’allez pas aimer ce que vous voyez. Certains jours, si j'ai des idées, c’est génial et il suffit de les réaliser mais d'autres jours il n'y a rien. Il faut apprendre à travailler avec cela.

Quand je passe par une phase sèche, je fais autre chose. Je laisse l’oeuvre pendant un certain temps, j’organise mon studio, j’étire des toiles ... Certains artistes sont très disciplinés et vont tout simplement continuer à travailler même s’ils ne sont pas inspirés, mais je ne peux pas faire cela. Une façon de redémarrer est d'essayer un style différent, donc parfois je fais des peintures abstraites.

Il y a une perception que la peinture doit être amusant, un passe-temps qu’on fait pour se détendre. Mais ce n’est pas aussi amusant que les gens pensent. Si vous voulez en faire une carrière, il faut non seulement produire un certain volume, inspiration ou pas, mais il faut aussi développer le côté entreprise et la commercialisation de votre produit. La plupart des artistes ne sont pas très doué à ce dernier, y compris moi-même.

Quelle est votre plus grande joie?

Une pièce complétée serait ma plus grande joie. Vous investissez votre estime de soi dans cet objet que vous créez. À cet égard, vous êtes très vulnérable. Un tableau raté peut être un vrai point négatif! C’est le même processus avec l'écriture; faire face à la page blanche par exemple, ou tout effort créatif vraiment. Vos émotions sont si liés à votre travail. Il faut savoir surmonter les inhibitions et peindre avec courage. Je veux que ceux qui regardent mon tableau en subissent une réaction émotionnelle, c’est ce que j’investis que dans mon travail. Si quelqu'un veut l'acheter, c’est très bien; c’est le plus grand compliment. C’est très satisfaisant quand ça ce passe.

 

Marie-Hélène Marmen Morell